«SI TU VOTES POUR TRUMP, JE NE TE PARLE PLUS»

Martina Navratilova et son ex-rivale Chris Evert ont partagé leur complicité dimanche à Wimbledon. Si la maladie les a réunies, la politique aurait plutôt tendance à les diviser.

Chris Evert versus Martina Navratilova, c’est sans doute la plus féroce et prestigieuse rivalité de l’histoire du tennis. Les deux Américaines – la seconde fut tchécoslovaque jusqu’en 1981 – se sont affrontées à 80 reprises entre 1973 et 1988, dont 60 fois en finale (14 en Grand Chelem). Si Martina Navratilova, 67 ans, domine son aînée de deux ans au niveau des confrontations directes (43 victoires pour 37 défaites, 36-24 en finale), les deux femmes sont liées par une immense complicité. Elles l’ont affichée dimanche en marge de Wimbledon, lors d’un rendez-vous avec la presse.

Souriantes, les deux vieilles copines, qui comptent chacune 18 titres du Grand Chelem en simple, se sont remémorées quelques-unes de leurs anciennes batailles, dont 14 ont eu lieu en finale d’un tournoi majeur (10-4 en faveur de Navratilova, dont cinq triomphes sur le Centre Court). Elles ont aussi évoqué leur rôle en faveur du développement du tennis féminin, dans le sillage de la pionnière Billie Jean King.

«C’est tellement ironique de voir nos deux carrières, notre façon d’être à la fois rivales et toujours du même côté des choses, a souligné Chris Evert. Martina et moi, nous en rions. De tous les endroits au monde, nous avons choisi le Colorado et la Floride pour vivre. Même après notre retraite, on a eu le cancer en même temps.»

Si souvent opposées au sommet de leur forme, les deux ex-reines du circuit ont ensuite été rapprochées par la maladie. «C’est étonnant de se dire qu’en un sens, ce cancer était une bénédiction, notamment parce qu’il nous a unies, s’est émue Martina Navratilova. Cela nous a amenées à un tout autre niveau d’amitié, de compréhension et d’affection.»

«Elle m’a été d’un tel soutien, apprécie Chris Evert à propos de son éternelle consoeur. Elle venait chez moi pour me faire des soupes ou des pâtes – je ne suis pas bonne cuisinière. Elle prenait soin de moi, m’appelait pour voir si tout allait bien. Nous avons traversé tant de tranchées lors de tous ces matches, toutes ces finales, à perdre ou à gagner. Alors maintenant, si une fois encore je dois passer par des tranchées, je ne choisirais personne d’autre que Martina pour le faire.»

Cette dernière a bien ri au moment de lever un voile sur la personnalité de Chris Evert: «Elle avait toujours l’air propret, guindé, mais quand elle prenait un ou deux verres de vin, elle pouvait raconter les blagues les plus cochonnes», s’est marrée celle qui a régné 332 semaines sur le tennis féminin – contre 260 à sa rivale.

«Super, merci d’en parler», a souri Chris Evert avant que la discussion ne glisse sur un autre terrain: la politique. Activement investie dans la campagne présidentielle américaine en faveur du parti démocrate de Joe Biden, Martina Navratilova milite, comme elle l’a toujours fait. Son ex-adversaire, elle, hésite: «Biden, c’était mon choix, mais ces derniers jours ont été tristes, j’étais déprimée en regardant le débat. J’ai des doutes à propos des deux candidats, je n’ai pas de réponse.»

Celle de Martina Navratilova claque comme l’une de ces montées au filet dont elle avait le secret: «Si tu votes pour Trump, je ne te parle plus.» Réplique en revers slicé de Chris Evert: «J’aime bien Biden, je l’ai rencontré et c’est un homme bien, qui a beaucoup fait pour le pays ces 40 dernières années. Mais à un moment, on veut quelqu’un de pointu.» Contre à la volée: «Tu penses que Trump est pointu?» Amorti final: «Je me fais du souci à propos des deux candidats.»

Le début d’orage est passé. Martina Navratilova et Chris Evert, auxquelles un documentaire vient d’être consacré, ne réussiront pas à se fâcher pour de vrai. Née sur les souvenirs de tant de batailles communes, leur amitié a de beaux jours devant elle. Quant aux Etats-Unis…

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